Société-Culture

Reprise de la production à la SN SOSUCO «Nous avons dû explorer la solution judiciaire» (Dixit le DG Mouctar Koné)

Après exactement un mois et deux jours de blocage, la SN SOSUCO a repris du service le 11 décembre 2015, jour de la commémoration de la fête nationale du Burkina. L’Economiste du Faso a rencontré son directeur général, Mouctar Koné, le 22 décembre 2015. Les échanges ont porté sur les conditions de la reprise, l’impact de la crise sur l’entreprise et bien d’autres aspects.

– L’Economiste du Faso: Après plus d’un mois de blocage, comment l’activité a-t-elle repris à la SN SOSUCO?
Mouctar Koné, DG de la SN SOSUCO : Il faut noter que cette crise qui a commencé depuis le 9 novembre 2015 est passée par différentes étapes de négociations et de tentatives de négociations par les autorités administratives, coutumières et religieuses qui ont toutes buté contre l’intransigeance de ceux qui bloquaient l’usine qui, en grande partie, n’étaient pas des travailleurs de l’usine. Ce sont les riverains auxquels se sont joint d’autres personnes.
Donc, il a fallu passer par la voie judiciaire pour demander une évacuation de l’usine qui a été accordée par la justice. Laquelle évacuation a été exécutée par les éléments de la CRS le 8 décembre 2015. C’est ce qui nous a permis de rouvrir l’usine. Et, à l’heure où nous parlons, pratiquement tous les ouvriers ont rejoint leurs postes de travail.

– Quel a été l’impact réel de la crise sur la SN SOSUCO ?
L’impact a été très grand pour la SN SOSUCO. D’ailleurs, il est de différents ordres. Nous avons commencé la campagne le 7 novembre 2015. Et c’est 2 jours après que le mouvement a commencé. C’est dire que les meneurs de la lutte attendaient tranquillement que la campagne commence pour opérer ce blocage. Parce que leur but était d’empêcher la campagne de se tenir et, à terme, de fermer la société.
A cette date, il y avait déjà 2.500 tonnes de canne qui avaient été coupées, broyées par l’usine et qui ont été entièrement perdues. Environ 3.500 autres tonnes de canne qui avaient été coupées se trouvaient dans les champs.
N’ayant pas pu été usinée pendant un mois, cette canne n’était plus utilisable. Au niveau des champs, les évaluations sont en train d’être faites et on ne saura réellement l’impact qu’après la présente campagne et même la campagne prochaine.
Au niveau commercial, il y a un mois de vente que nous n’avons pas opéré et même un mois de production que nous n’avons pas pu faire. C’est au minimum 6.000 tonnes de sucre que nous aurions pu produire et vendre également, sans compter les autres dégâts qu’on a constatés çà et là et que nous sommes en train d’évaluer. N’oubliez pas que le jour de l’évacuation, il y en a qui ont volontairement mis le feu à du matériel de la sucrière et nous sommes en train d’évaluer. Pour sûr, au moment de l’évacuation, nos évaluations tournaient autour de 700 millions de F CFA de pertes. Au finish, je pense que nous serons à plus d’un milliard.

– Qui sont donc ceux qui, à l’ombre, manipulent les travailleurs ?
Cette question, je préfère qu’on la laisse à la justice qui est en cours. Les enquêtes se poursuivent et j’espère que la justice nous permettra de nous éclairer sur les réalités de ce mouvement.

– Au nombre des revendications, y en a-t-il qui méritaient quand même un examen de la part de la direction ?
Il n’y a pas d’entreprise où les points de revendications des travailleurs ne méritent pas d’être examinés. Lorsqu’on voit dans la plateforme, les points qui méritent d’être examinés, aucun de ces points ne justifie l’acte qui a été posé. Le point essentiel, c’est la révision du statut. C’est pourtant quelque chose que la direction demandait et que les travailleurs refusaient. Je ne comprends pas que ça devienne un point aussi important pour les travailleurs au point qu’ils aillent bloquer l’usine. Pour moi, c’est défoncer une porte qui est déjà ouverte. On comprend dès lors que le but de ce mouvement n’est pas les problèmes des travailleurs, mais des desseins inavoués. Sinon, les points sur lesquels on devait échanger, nous avons déjà rencontré nos travailleurs, nos syndicats avec les délégués du personnel pour en discuter. Et nous avons déjà mis en place un début de programme de discussions sur ces points qu’ils nous soumis et nous allons entamer la discussion là-dessus. Il faut même souligner que la semaine où ce mouvement a commencé, nos syndicats avaient déjà préparé leur cahier des charges qu’ils devaient déposer à la direction.

– Un appel à ceux qui ont rejoint leurs postes de travail ?
C’est de les encourager et surtout les remercier pour leur disponibilité. Ils voulaient vraiment reprendre ce travail longtemps, on le sait. Ils l’ont repris et tout se déroule très bien. On voit les résultats de l’usine dès le départ. Nous avons été obligés à un moment donné de décider d’un chômage technique, c’était une obligation parce qu’on ne pouvait pas faire autrement.
Ce mouvement touche même ceux qui n’y ont pas pris part et c’est demander la compréhension de ceux-ci. Qu’ils sachent qu’il n’a jamais été dans l’intention de la direction ni des actionnaires de brimer qui que ce soit. En réalité, c’est la situation qui a prévalu qui nous a obligés à prendre ces dispositions.
Sy Amir LOOKMAN


A propos des manifestants

«Je précise que moi-même, en tant que DG, je figure parmi les personnes dont on demandait le départ. Mais lorsque vous dites les travailleurs, je corrige en disant que la majorité des gens qui étaient dans ce mouvement n’était pas des travailleurs de la SN SOSUCO. D’ailleurs, ce n’est pas à eux de décider si quelqu’un doit partir. C’est aux actionnaires de l’entreprise et à la direction de décider s’ils doivent sanctionner quelqu’un pour des actes qu’il a posés.
Les véritables dirigeants du mouvement étaient dans l’ombre et ce sont eux qui décidaient. Le but ultime, c’était la fermeture de la SOSUCO. Mais malheureusement, ceux qu’ils utilisaient ne savaient pas quel était le but réel de ce mouvement. Ils étaient manipulés à leur insu. Le fait de prendre comme préalable le départ d’un certain nombre de personnes, ils savaient très bien qu’aucune entreprise ne peut accepter cela de la part même des travailleurs, à plus forte raison des gens qui ne sont des travailleurs de l’entreprise.
Donc, ils s’arc-boutent là-dessus pour empêcher que nous puissions avancer dans les discussions. C’est ce que nous avions appris, à tel point qu’il n’y avait plus d’autres arguments qu’un serment qu’on aurait fait sur un fétiche et que si on revenait sur ce serment, tout le monde allait mourir et même des familles en souffriraient. Quand on arrive à ce genre de blocage, il ne nous restait plus d’autres solutions que la voie juridique et c’est ce que nous avons choisi», a affirmé Mouctar Koné.

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